Dans un avenir proche, la vape sera-t-elle reconnue comme un outil de sevrage ? Pourquoi n’est-ce toujours pas le cas ? Et, à y réfléchir, serait-ce une bonne ou une mauvaise chose pour la filière ? Tels ont été les sujets abordés au cours d’une des conférences du Vapexpo Paris 2025, avec William Lowenstein et David Saint-Vincent. Ces experts médicaux nous éclairent sur la question.
Les intervenants
William Lowenstein est médecin, interniste et pneumologue de formation. Il est l’un des premiers à s’être intéressé à la question de la toxicomanie et des addictions en France. Il est considéré aujourd’hui comme l’un des pères de l’addictologie française et préside l’association SOS Addictions.
David Saint-Vincent est clinicien, responsable d’établissements médico-sociaux en addictologie et administrateur de l’association Fédération Addiction. Référent tabac dans cette organisation, il forme également les professionnels de santé à la vape, en lien avec l’association La Vape du Cœur.
La vape n’est pas considérée comme un outil de sevrage à l’heure actuelle
Patch, gomme, pastille… à ce jour, les substituts nicotiniques sont les seuls outils promus officiellement par les professionnels de santé et le gouvernement pour arrêter de fumer.
Aussi la vape n’est-elle ni disponible en pharmacie ni remboursée par l’Assurance Maladie.
Comme l’explique David Saint-Vincent, faire valoir la vape en tant qu’outil de sevrage en France demanderait de respecter des procédures particulières, propres au champ pharmaceutique.
Une démarche couteuse, qui se chiffrerait en milliards d’après le professeur William Lowenstein, et risquerait de mettre à mal tout ce qui fait de la vape un efficace outil de sevrage.
Car si la vape n’est pas reconnue comme tel, elle n’en reste pas moins l’un des meilleurs moyens pour se sevrer d’après toutes les études sérieuses menées à ce jour.
Mais elle le pourrait nous dit la Science
Depuis que la vape existe, soit une quinzaine d’années maintenant, son efficacité dans le sevrage a toujours intéressé les chercheurs.
La revue britannique Cochrane a d’ailleurs été l’une des premières à s’atteler au sujet, dès 2012. Concluant encore, 13 ans après, de son évident bénéfice pour les fumeurs.
En utilisant une cigarette électronique avec nicotine, nous dit-elle, une personne fumeuse augmente drastiquement ses chances de réussir à se détourner du tabac fumé sur le long terme.
À 6 mois ou plus, les chercheurs Cochrane relèvent en effet 10 % d’arrêt en moyenne chez les utilisateurs exclusifs de vapes [avec nicotine], contre seulement 6 % d’arrêt chez les utilisateurs exclusifs de substituts nicotiniques.
Reconnaitre officiellement ce type d’étude permettrait donc potentiellement de faire entrer la vape dans le champ des outils de sevrage. À ses risques et périls néanmoins…
Les bénéfices/risques à reconnaitre la vape comme outil de sevrage
Pour bien des addictologues, à l’instar du professeur Bertrand Dautzenberg, intégrer la vape aux outils de sevrage permettrait d’apaiser les craintes de bon nombre de fumeurs.
Je ne suis pas contre la vente en pharmacie, ne serait-ce que pour rassurer quelques mamies sur le sérieux du produit et mettre les pharmaciens dans le coup… expliquait-il dans une interview pour Michel Cymes, alias Dr.Good!
Mais, comme William Lowenstein et David Saint-Vincent, il émet une condition : que la vape ne soit pas uniquement réservée au secteur médical et pharmaceutique.
Car, pour un adulte fumeur, vapoter doit avant tout rester un plaisir facilement accessible, nous expliquent ces experts de terrain. L’équilibre est subtil : l’accessibilité est la sureté. Mais un cadre légal juste et pertinent est nécessaire. En informant, on prévient les mésusages.
En résumé
Pour ces professionnels de l’addictologie, il s’agit ainsi moins de reconnaitre la vape comme outil de sevrage que de lui octroyer une véritable place à elle dans la société, auprès des fumeurs.
Née en dehors de l’industrie du tabac et exempte de tout tabac et de toute combustion, la vape n’a d’abord rien à faire dans les produits du tabac. Elle mérite un cadre spécifique, dédié aux produits du vapotage.
La combustion tue. La vape non. La nicotine non plus. Les arômes sont essentiels au sevrage.
Preuve en est : on délivre de la nicotine même aux femmes enceintes. Et les gommes nicotinées n’ont jamais autant marché en pharmacie que lorsqu’elles se sont accompagnées de différents arômes.
Peu importe le produit, si vous voulez hystériser un débat, vous émettez l’idée d’une dangerosité chez les femmes enceintes et les jeunes, analyse David Saint-Vincent
Il nous faut un réel journalisme médical sur la question, explique William Lowenstein