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“Tous addicts, et après ?” : le vrai problème est ailleurs nous dit le Pr Lowenstein !

Dans son ouvrage “Tous addicts, et après ?”, co-écrit avec le Docteur Laurent Karila et publié en août 2017 aux Éditions Flammarion, le Professeur William Lowenstein en faisait déjà le douloureux constat : en matière de lutte contre les addictions, la France est dans une impasse et se refuse à en sortir.

Près de huit ans plus tard, rien n’a changé, déplore-t-il. “La France est accro à la prohibition” explique l’addictologue au magazine Technikart, ce 21 janvier 2025. Pour lui, l’État est devenu dépendant aux taxes puritaines et autres mesures répressives que l’on sait pourtant inefficaces et même contre-productives. Tant qu’il en est désormais aveuglé : il ne fait plus la différence entre le véritable problème et ses solutions.

Témoignage.

“Tous addicts, et après ?” : Changeons de regard sur les dépendances

Souvent considéré comme le père de l’addictologie française, William Lowenstein est médecin interniste spécialisé en addictologie. Il est également le fondateur et président de l’association SOS Addictions.

Laurent Karila est psychiatre spécialisé en addictologie, enseignant chercheur et coprésident du comité scientifique de SOS Addictions. Il intervient régulièrement en qualité d’expert dans « Ca commence aujourd’hui » sur France 2 présenté par Faustine Bollaert.

Ensemble, ces deux addictologues français coorganisent notamment chaque année le congrès virtuel E-ADD sur les addictions, avec le soutien de la MILDECA, la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives.

Forts de leurs expériences, ils ont également coécrit, en 2017, le livre “Tous addicts, et après ?”.

L’objectif : sensibiliser le grand public aux mécanismes de l’addiction. Et ainsi initier un vrai changement de regard dans la société.

L’ouvrage vient briser nombre d’idées reçues donc. Et, au passage, dénonce l’inefficacité des politiques de santé publique actuelles, bien trop focalisées sur la répression et la prohibition d’après ces experts… Mais trop peu sur la prévention et la réduction des risques.


Présentation de l’éditeur


« Les addictions flambent, elles gagnent du terrain, sous des formes déjà bien connues – l’alcool, le tabac, le cannabis, la cocaïne, les jeux de hasard et d’argent… – mais aussi renouvelées, comme le binge drinking, les nouvelles drogues de synthèse vendues sur Internet, les activités sexuelles en ligne, l’hyperusage des écrans – jeux vidéo, réseaux sociaux

Deux spécialistes reconnus dénoncent les conséquences d’une véritable maladie, et ces dizaines de milliers de morts évitables chaque année en France. Nous ne sommes pas à la hauteur de l’enjeu. C’est bien sûr une question de choix politique ; mais c’est d’abord et avant tout une question de regard !

L’addict est un citoyen comme les autres, et non un délinquant ou un looser. Souvent, son hyperactivité et ses qualités propres font sa vulnérabilité. Alors qu’il y a eu ces dernières années de vrais progrès dans la connaissance des processus addictifs, les traitements, la réduction des risques et des dommages, la société, dans son entier, est restée figée dans le jugement, enfermant les malades dans leur culpabilité et leur isolement.

Tous addicts, et après ? s’adresse à tous ceux qui veulent comprendre et agir – addicts, parents, grands-parents, accompagnants, patients-experts, soignants. Il explique les mécanismes des addictions, fait le point sur les nouveaux comportements addictifs, les approches actuelles des traitements, mais aussi sur les potentiels encore insuffisamment exploités de la prévention et de la réduction des risques.

Les solutions existent. Pensons, agissons autrement ! » – Tous addicts, et après ? (2017) Préambule

8 ans après : le point de vue du Pr William Lowenstein sur la question des addictions

Une décennie s’est presque écoulée depuis la sortie de l’ouvrage. Pourtant, ce dernier reste malheureusement bien d’actualité.

En matière de lutte contre les addictions, la France n’est pas plus avancée. Comme l’a récemment montré le rapport 2025 “Drogues et Addictions, chiffres clés” de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT), le pays reste en proie aux addictions. Particulièrement celles impliquant des drogues illicites.

La question se pose donc : que fait le gouvernement ?

Mardi 21 janvier 2025, le magazine Technikart a ainsi rencontré le Professeur William Lowenstein pour recueillir son avis et son expertise en la matière [*].

Pour cet éminent addictologue, la réponse tient en trois temps :

  • Le problème des addictions est largement sous-estimé en France. Alors que les addictions tuent 40 fois plus que les accidents de la route, les campagnes de prévention autour des addictions sont bien plus rares et mal coordonnées.

S’ajoutent à cela les intérêts économiques et les croyances populaires qui persistent, du type “On est un mauvais patriote si on ne boit pas”

  • Les stratégies de lutte anti-tabac reposent essentiellement sur les taxes. Or, ces dernières présentent de nombreuses limites en termes d’efficacité. Mais, parallèlement, elles représentent un grand intérêt économique pour l’État, qui en est devenu dépendant, nous dit le Professeur Lowenstein.

“Si on est efficace, les milliards ne rentrent plus. Vous voyez un peu le cercle vicieux qui s’est installé sur ces taxes puritaines”.

Et enfin : le gouvernement se refuse à reconnaitre et à promouvoir des produits de réduction des risques. Chaque année, durant le Mois Sans Tabac, la vape est volontairement exclue des campagnes de santé publique. Et chaque année, des projets de loi tous plus répressifs les uns que les autres sont présentés au gouvernement ou dans les médias.


Extraits choisis


Interrogé sur la pertinence de la cigarette électronique dans la lutte contre l’addiction au tabac fumé, le Docteur William Lowenstein a plaidé pour un renversement du principe de précaution, au nom de la santé publique.

« L’e-cigarette est la révolution thérapeutique la plus importante que l’on ait connue dans ce domaine. L’addiction à la cigarette fumée est une addiction sévère. Je dis “cigarette fumée” parce que c’est la combustion qui fait tous les dégâts : goudron, monoxyde de carbone, benzopyrènes, etc. C’est elle qui est responsable des cancers, infarctus et insuffisances respiratoires. La combustion, c’est comme si on se mettait, vingt, trente fois par jour pendant une minute, derrière un pot d’échappement !

La e-cigarette, c’est de la vapeur ; pas plus embêtante que la vapeur d’eau. Une évaluation du Royal College of Physicians a prouvé qu’il y avait 95 % de risques en moins. Et on nous demande d’attendre cinquante ans alors que, chaque année, la cigarette fumée tue 75 000 Français. Même si on n’est pas totalement sûr, est-ce qu’on continue à appliquer le principe de précaution quand il se transforme à non-assistance à fumeurs en danger ? C’est ce qui nous oppose aux Anglo-saxons qui sont à fond dans le pragmatisme et soutiennent cette alternative. Parce que c’est de la dépendance à la nicotine dont il s’agit.

Mais être dépendant, ça ne veut pas dire en mourir. On est dépendant à plein de choses, aux médicaments contre la tension artérielle qu’on doit prendre à vie, à ceux pour baisser le taux de cholestérol, etc.

En tant qu’addictologue, la dépendance me gêne beaucoup moins que la mort » – Dr William Lowenstein


Puis, questionné sur la possible interdiction des sachets de nicotine “pouches”, dans le collimateur du gouvernement, le Professeur William Lowenstein a défendu l’utilité de ces produits alternatifs, sans fumée ni tabac, et plaidé pour une juste régulation.

« Les sachets de nicotine représentent une alternative importante pour réduire les risques liés au tabac. Les interdire priverait les fumeurs français d’un outil moins nocif que la cigarette. La cigarette électronique nous a montré cette voie salvatrice de la réduction des risques. Ces dispositifs ont permis à de nombreux fumeurs de se détourner du tabac.

Pourquoi ne pas poursuivre cette logique en encadrant strictement ces nouveaux outils plutôt que de les bannir ? Une réglementation bien pensée, par exemple sur les arômes et les emballages, permettrait de limiter leur attrait chez les jeunes, tout en garantissant aux fumeurs adultes un accès encadré à ces produits.

Il ne s’agit pas de se battre contre la nicotine en première intention ; il s’agit de se battre contre la combustion » – Dr William Lowenstein

Source

[*] Dr William Lowenstein : “La France est accro à la prohibition”, Technikart, 21 janvier 2025

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